Le Festival international de la bande dessinée d’Angoulême vit en 2026 ce que beaucoup décrivent déjà comme un véritable naufrage. La “mise à l’arrêt” annoncée par 9e Art + actera peut-être l’une des plus grandes crises de l’histoire du neuvième art. Ce naufrage du festival BD d’Angoulême 2026 marque un tournant que personne ne peut ignorer.
L’image du Titanic n’est même plus une métaphore : c’est un reportage. Pendant des années, Angoulême s’est vu comme un paquebot impossible à couler, renforcé par une organisation qui se rêvait indispensable. Mais même les géants sombrent lorsqu’ils naviguent en fermant les yeux.
Les fissures étaient visibles depuis longtemps : tensions répétées avec les auteurs, éditeurs exaspérés, décisions incompréhensibles, gouvernance qualifiée d’opaque, et surtout un scandale majeur — le licenciement d’une salariée ayant porté plainte pour viol — qui a définitivement révélé que la coque n’était pas seulement abîmée, mais perforée de part en part.
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L’iceberg n’était pas invisible. Il portait même un panneau lumineux.
Un festival fragilisé par une organisation qui n’a jamais su se remettre en question
Depuis des années, 9e Art + accumule les critiques, semblant croire qu’un festival peut tenir debout avec une transparence minimale, une communication hésitante et une capacité fascinante à ignorer absolument toutes les alertes.
Plus le FIBD grandissait, plus son organisation semblait se recroqueviller, incapable de comprendre qu’un mastodonte doit parfois ralentir, écouter et corriger sa trajectoire.
À force de confondre “grand” et “bien géré”, Angoulême a fini par perdre de vue ce qui faisait sa force : ses auteurs, ses autrices, ses éditeurs, son public.
Tout ce que 9e Art + n’a jamais su entendre.
Auteurs et éditeurs : une rupture devenue inévitable
Les revendications des auteurs étaient claires : une véritable écoute, une prise en compte de leurs conditions de travail, un engagement sérieux contre les violences sexistes et sexuelles, et un festival qui ne les traite pas comme des accessoires.
Les éditeurs, eux, demandaient simplement un événement cohérent, lisible, professionnel — pas une machine administrative qui se grippe à chaque tournant.
Rien de tout cela n’a été obtenu.
Alors auteurs et éditeurs ont fait ce qu’on fait face à un navire qui refuse de bouger : ils ont sauté par-dessus bord.
Et un festival sans eux, c’est un aquarium vide. C’est joli, mais ça ne sert plus à rien.
Pendant ce temps, la bande dessinée continue de vivre
Au-delà du tumulte d’Angoulême, la bande dessinée poursuit tranquillement sa route. Le neuvième art n’a jamais dépendu d’un seul rendez-vous, aussi emblématique soit-il.
En France, des festivals comme Quai des Bulles, WeDoBD ou le Lyon BD Festival rassemblent chaque année auteurs, autrices et lecteurs dans des formats différents, chacun avec sa personnalité et sa manière d’accompagner les artistes.
À Bruxelles, l’un des grands rendez-vous européens continue d’accueillir un public fidèle, sans chercher à rivaliser avec qui que ce soit, simplement en faisant ce qu’il sait faire : célébrer la BD.
Ces manifestations rappellent une chose essentielle : la bande dessinée s’épanouit là où elle trouve du respect, de l’organisation et de l’espace pour exister.
Un festival peut traverser une crise, disparaître ou se réinventer.
La BD, elle, continue d’avancer. Toujours.
Une ville face à son rendez-vous manqué
Angoulême doit maintenant gérer l’héritage laissé par 9e Art + : un vide économique massif et un manque de confiance historique.
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Hôtels, restaurants, librairies, taxis, écoles d’arts graphiques… toute la ville vivait au rythme du festival.
Aujourd’hui, c’est comme si on avait retiré la colonne vertébrale d’un organisme entier.
Il faudra du temps, et surtout une nouvelle manière de travailler, pour reconstruire un FIBD crédible.
Et pendant que le navire sombre… Mikl Mayer reste à quai
Soyons honnêtes : ce n’est pas cette année qu’on verra Mikl Mayer à Angoulême.
Et on le comprend. Dans un chaos pareil, mieux vaut rester tranquillement à quai plutôt que d’embarquer sur un bateau qui prend l’eau avant même d’avoir quitté le port.
On reviendra quand on sera sûr que quelqu’un, quelque part, tient vraiment la barre.
Fin d’un cycle, début d’un autre
La mise à l’arrêt de l’édition 2026 ne signe pas la fin d’Angoulême, mais bien la fin d’un modèle piloté par une organisation qui n’a jamais compris qu’on peut perdre un festival comme on perd un navire : d’un seul coup, mais après des années d’aveuglement.
Pour renaître, Angoulême devra revoir sa structure, ses priorités et son rapport au monde de la BD.
L’ère 9e Art + touche à sa fin.
Et ce n’est peut-être pas la plus mauvaise nouvelle de l’histoire du festival.



